lundi 22 décembre 2008

Au Cap 16: La tempête

Je suis allée au Cap toute seule avec mon ami B*, sa douce étant retenue par le travail et les enfants en week-end aux quatre vents. Quand nous sommes entrés, il faisait -1 dans la maison. Par conséquent, les tuyaux étaient gelés. Nous avons fait fondre des grandes chaudrées de neige pour dégeler les robinets, en croisant les doigts pour que la tuyauterie tienne le coup et qu'elle ne soit pas condamnée à exploser en créant une inondation dans la cave. Ou pire. Qu'il n'y ait pas d'eau du tout pour les ablutions de la visite attendue au jour de l'an. La truie a mis plus de 4h à réchauffer un tant soit peu les chambres et les roches-de-lits. Nous avons mangé nos homards avec des mitaines, la musique de Pacifica en trame de fond, nos tuques sur la tête et deux bouteilles de vin qu'on a bues les pieds sur la porte du four ouverte.

Notre mission de la fin de semaine était de boucher les trous, sabler et mettre la couche d'apprêt sur les murs de la salle de bain nouvellement refaite. Après une dure journée de labeur, le corps blanc et jaune de poussière de peinture, les cheveux sales, la peau maculée de potée et de sueur, j'ai voulu me laver dans la nouvelle douche; pas d'eau chaude. ARGH! COMMENT ÇA, STIE??? Descend à la cave voir les fusibles du chauffe-eau. Monte ouvrir les robinets du haut. Fait couler le robinet de la cuisine. L'eau chaude coulait partout sauf dans la salle de bain où je venais de travailler de longues heures. S'il faut ouvrir les murs, je vous promets que je hurle. Mais bon. Paraît que les maisons de campagne sont pleines de surprises et qu'il faut les aimer, en faire notre pain quotidien et les encaisser sans broncher. Comme se plaît à dire mon ami B*: on apprend à connaître notre maison. Il n'a pas tort.

Samedi, nous avons été avisés de la tempête à venir par la douce, inquiète de nous savoir sur la route du retour. B* et moi n'avons échangé qu'un seul coup d'oeil pour déterminer de concert que nous serions (volontairement) pris dans la tempête, au Cap. La maison avait atteint la température respectable de 25 degrés (la truie était en feu!), nous étions allés au ravitaillement (après avoir boosté la Corolla qui s'était étouffée dans le banc de neige), les steaks marinaient, un gratin dauphinois cuisait lentement sur le poêle et nos gin tonics se laissaient boire tous seuls. C'est donc sur des airs du sud que nous avons attendu les premiers grains de la tempête. Après le souper, il nous a bien fallu constater que le tempête rageait partout ailleurs, sauf chez nous; les montagnes aux coyotes nous protégeaient du vent qui venait de l'ouest. On aurait dit qu'une géante passait la neige au tamis. Il n'y avait que de fins tourbillons de poudreuse, quelques rideaux de flocons plus compacts qui s'étalaient paresseusement sur la route, un silence piquant la nuque, et la lueur des réverbères appelant nos pas sur la route recouverte de sucre.

J'ai dormi 3 nuits le ventre collé sur la grosse roche ronde, sous la couette de plume offerte par la mamie. Je suis allée voir ma rivière, la grève où grondaient les glaces compactes charriées par la marée, j'ai cuisiné de bons petits plats pour mon ami et j'ai travaillé fort. La lumière dont j'avais besoin était là. La tristesse d'avant Noël a été emportée par le Cap.




2 commentaires:

Anonyme a dit…

J'aurais envie d'y être. Ce billet me fait rêver... Complètement(!)

Miléna a dit…

Je sais. On a tous besoin d'un endroit comme ça. Ça n'arrive jamais, en ville, de marcher dans un silence si dense qu'il ne laisse même pas de place à nos idées. Sois le bienvenue. Et comme le titre le dit, c'est le 16e billet sur le Cap. Désolée de ne pas avoir mis de libellé pour que tu repères plus facilement les autres, mais si tu veux aller les lire... tu es le bienvenue.