Hier, je suis revenue de Montréal dans la tempête. Elle a commencé à Boisbriand et elle m'a accompagnée jusque chez moi. Elle me précédait de quelques kilomètres, bien décidée à me damer le pion, la coquine. J'étais enroulée dans les spirales de neige folle qui naissent sous les 12 roues, le bitume était une comme une rivière grondante au printemps; plein de tourbillons blancs presque écumeux. Mes roues dérapaient dans les congères (j'adore ce mot!), et la neige mouillante collait à mes nouveaux essuie-glace de luxe en laissant une grande courbe trouble et coulante juste devant mes yeux. Je tendais le cou et j'étirais le dos, le pied gauche sur la pointe des orteils pour voir où j'allais, c'était fort inconfortable. J'ai roulé pendant quatre heures la musique à fond, les yeux aveuglés par les phares des innocents qui roulent à 115km/h. J'ouvrais ma fenêtre de temps en temps pour sentir le vent fou entrer à pleine gueule dans mon oreille gauche parce que j'aime tous les vents, surtout celui des tempêtes. Je ne supporte pas d'être confinée dans un espace sec et brûlant, je n'aime pas manquer d'air. Je ne vous cacherai pas que j'avais un peu peur. Je ne me fiais qu'à ma mémoire des courbes de cette route que j'ai si souvent parcourue la tête ailleurs et j'attrapais tout de même la bande gaufrée sur l'accotement; les panneaux fléchés me sautaient au visage dans une lueur exsangue. Mes omoplates brûlaient. Quand j'ai vu le panneau:"La Capitale nationale vous souhaite la bienvenue", j'ai poussé un soupir de soulagement intense en faisant des yahou dans ma tête. J'y étais presque!
Arrivée chez moi, j'ai largué mes sacs en vrac dans l'entrée, enlevé ma tuque, jeté mon manteau sur la chaise, j'ai inspiré l'air ambiant et fait ma tournée de l'appartement pour retrouver mon espace. (Et pour m'assurer qu'il n'y avait pas de bandit caché dans un recoin!). Je me suis mise en pyjama et je me suis servi un verre de vin que j'ai savouré lentement debout près de la fenêtre en réfléchissant. J'accorde vraiment beaucoup d'importance à la route. Je ne sais pas trop comment exprimer à quel point je fais corps avec elle. Elle est devenue comme un prolongement de moi, un endroit où je me retrouve très souvent seule et où je teste mes limites. Pour les repousser, pour me secouer, réfléchir, me calmer ou me provoquer.
C'est pour ça qu'hier, j'ai pris la route au lieu d'aller dormir chez toi au chaud, Marius.
7 commentaires:
Pour ma part, je suis descendu à Gatineau jeudi. Première route sous la tempête en écoutant les Rita Mitsouko. L'hiver commence vraiment..!
David: Ouais ben aujourd'hui, j'espère que tu restes chez toi!:)
xx
Délicieuse note encore une fois, Miléna.
Merci, &. Il fait tempête encore aujourd'hui. Mais cette fois, je ne ferai pas exprès, je reste les pieds dans mes bas de laine à regarder la ville disparaître.
Je te trouve bien courageuse de braver la tempête... seule de surcroît!
Je n'avais même pas mis le nez en dehors de l'hôtel (je suis aussi à Qc présentement...) que j'avais déjà confirmé que nous resterions un soir de plus!
varelie: oh! J'aurais bien aimé te voir! T'es encore là?
Non, lorsque j'ai fini par pouvoir me connecter à Internet à l'hôtel, c'étais déjà le temps de revenir. (C'est un peu ma faute, je n'avais pas mon câble réseau et eux, pas d'Internet sans fil... vive Jaro et sa gang!)
Mais bon, j'y vais souvent, on aura sans doute la chance de se reprendre sans tempête!!
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