vendredi 4 juillet 2008

Cornélius

Ce matin après m'être affalée d'un pas lourd hors de mon lit, j'ai ouvert toute grande ma porte pour regarder la lumière danser sur ma ville chiffonnée. C'est qu'elle a fait la fête hier, la coquine, et elle a dansé jusqu'à plus d'heures sous les explosions des feux grandioses (et le mot est faible) qui se sont déchaînés au-dessus de son grand fleuve pour offrir le plus beau spectacle que j'aie vu de ma vie. Hier, Québec était la plus riche et magnifique Dame du Monde.

Mais je m'égare, tel n'est pas le propos de ce billet. Ce matin, donc, j'ouvre toute grande ma porte et en baissant les yeux, voilà que j'aperçois un minuscule colimaçon en nage, les antennes molles, la traîne visqueuse, la coquille maculée de traits noirs.


L'escargot, à boutte et effondré.

Surprise et ravie, je me penche pour le recueillir dans ma paume avec une tendresse infinie; je craque totalement pour ces bestioles. Je n'y peux rien, j'ai une faiblesse pour leur trogne. Cependant, je me demandais comment diable il avait pu se jucher jusqu'à mon nid de coucou au troisième étage sans se faire dévorer par les Chats Sauvages qui règnent en rois et maîtres sur tout le territoire. Ils sont sanguinaires et sans pitié. Surtout le Gros Roux, leur chef incontesté, qui est un despote à la mine patibulaire, aux poils gras autant que mottoneux et aux ongles acérés. Il a l'oeil du lynx et la perfidie de la panthère silencieuse qui rôde le ventre au sol. Je le déteste. À cause de lui, je dois laisser toutes mes fenêtres fermées en mon absence sous peine d'invasion de domicile. Je l'ai surpris quelques fois à lardonner sur mon divan BEIGE (!!!) toutes griffes dehors, le salaud. Il aime mon odeur et il ne se gêne pas pour me le faire savoir. Il raffole également de ma cuisine et guette avidement le jour des poubelles pour éventrer les sacs et les déchiqueter d'un air sournois.

Bref. J'ai caressé un moment mon nouvel ami entre les antennes pendant qu'il reprenait son souffle, l'ai juché sur mon épaule le temps de me faire un café, puis je l'ai posé sur la table devant moi et je l'ai enjoint à me raconter toute l'histoire, sans lésiner sur les détails. Je me sentais d'attaque. Comme j'ai été récemment initiée à la langue escargotoise (merci Mac, je savais bien que ça pourrait servir un jour), j'ai pu comprendre qu'il s'est échappé des mains de deux fillettes qui l'ont capturé il y a plusieurs semaines en même temps que 32 de ses acolytes. Ils se sont fait surprendre à la brunante alors qu'ils prenaient le frais sous les buissons en papotant des dernières nouvelles d'outremer, transmises avec force détails par Donat, un aïeul qui revenait tout juste au pays après un périple de 8 ans. Les fillettes, donc, sont arrivées subrepticement par derrière et les ont coffrés en moins de deux dans une boîte en carton tapissée d'herbe (quand même), puis elles les ont enfermés dans leur maisonnette secrète.


Cornélius me racontant son épopée

Il m'a raconté en tremblant qu'elles les ont ensuite saisi un à un pour tracer des lettres étranges sur leur coquille. C'est ainsi qu'il s'est vu affublé du prénom farfelu de "Martin", alors que son vrai nom est Cornélius, fils d'Herménégilde, frère d'Aloïsus et cousin d'Ambroise, notre bien aimé ami. Parlons d'un sacré hasard. J'en étais toute chamboulée. Cornélius a entendu parler de moi à travers les branches et pris de cours, il a préféré trouver refuge ici que de se camoufler sous le patio des harpies, où vit une famille de suisses dentus et constamment affamés.

Je lui ai promis de l'amener avec moi au Cap et de lui trouver le plus beau coin qui soit.

Maintenant, je dois aller chercher les autres. Argh. Ma vie est périlleuse.



Il est chou, non?

12 commentaires:

Virginie a dit…

Trop mignon ton Cornélius :)

Jo Jaguar a dit…

Il semblerait qu'il existe de plus en plus de trafic de gastéropodes destinés aux courses illégales. Les réseaux s'intensifient et les courses mobilisent des sommes d'argent de plus en plus importantes. Je pense que les traits noirs sur la coquille sont des chiffres destinés à identifier le concurrent d'une de ces courses clandestines qui peuvent durer des jours entiers jusqu'à épuisement des spectateurs. Non?

Miléna a dit…

Virge: N'est-ce pas? Je le ballade depuis ce matin dans le repli de mon coude. Il colle là tout seul.

Jo: Oui. Je ne voulais pas aborder ce sujet sensible. & l'a déjà fait dans ses Chroniques Colimaçonnes et je dois avouer que ça me fout les boules. Je n'aime pas trop ce qui est illégal... :0)

McDoodle a dit…

Le repli de ton coude à une texture... weird !

Miléna a dit…

Doodle: Yeah! T'es de retour? Tu me manquais. Mais c'est pas le repli de mon coude qui a une texture weird, c'est lui qui est plein de micro-ventouses. Nunuche! :0)

Gomeux a dit…

C'est pas un code barre qu'il a sur les fesses?
C'est peut être un dangereux criminel tatoué-mythomane en cavale.
Méfie toi, un peu, quand même.

Miléna a dit…

Gom: T'inquiètes. Je suis petite, mais je suis encore plus grande que lui.

Jo Jaguar a dit…

Je viens d'acheter "Incroyablement fort et extrêmement près"( non c'est pas ça!), intrigué par votre "Top des meilleurs livres a vie".
"Tout est illuminé" a été arrêté au bout de 10 pages, mais celui-là je devrais le finir. Merci en tout cas.
Je voulais dire un autre truc mais j'ai oublié.
Mélanie->Miléna: bien vu! Hi Hi!
(c'était pas ça, j'ai vraiment oublié)

McDoodle a dit…

Hon. Ok, moi aussi je veux des vicro-mentouses !

Revenue de Cape Cod, du sable et de la mer.
Super site de camping en plus. La totale.

Mek a dit…

Je craque !

Jo Jaguar a dit…

On dirait que Cornélius est en train de s'éclater à faire du patin à glace.

'nique a dit…

Tu lui donnes de la salade au moins?
Pov'ti prout.