jeudi 4 septembre 2008

Nuit blanche

La nuit est longue. Il est agité. Il tire sur le drap en l'entortillant rageusement autour de ses poignets. Il donne des coups de pieds, il s'éveille en sursaut toutes les demies-heures en tentant de faire entrer de l'air dans ses poumons. On dirait qu'il se noie. Il regarde autour de lui en se tenant sur un coude, les cheveux en l'air, la bouche gonflée comme un gamin de 7 ans qui fait un cauchemar. Puis il soupire en se laissant retomber nerveusement, il boxe l'oreiller sans trop savoir où poser la tête. Je glisse ma main silencieuse sur son torse. Les mots seraient trop vifs dans la pénombre. Des mots exsangues imprimés sur la moiteur de sa peau, des phrases vaines tatouées dans l'espace qui sépare son épaule de la mienne. Je préfère me taire. Mais je suis là. Comme une amie qui veut lui dire cent fois "je t'aime" pour tous les mots enfuis dans les valises de celle qui l'a quitté.

À 5 heures du matin, il sort doucement du lit pour ne pas me réveiller. Il ne sait pas que je veille depuis des heures, incapable de m'endormir alors qu'il trépigne pour que se dissipent les odeurs stagnantes et les souvenirs languides. J'entrouvre les yeux pour le voir se jucher sur la tablette de l'oriel. Il regarde la ville s'étirer tranquillement pendant qu'en lui, les ombres gagnent du terrain sur l'aube. Il pose son menton entre ses genoux, ses épaules nues soulevées par des sanglots violents qu'il essaie d'endiguer en silence. Je le laisse surplomber le vide. Je me doute qu'il ne veut pas que je le vois s'effondrer. Il pleure encore longtemps avant de revenir s'étendre. Il reste d'abord loin de moi, le dos perché sur le bourrelet du matelas. Puis il se retourne et colle son ventre contre mon dos en enserrant ma taille de son bras. Je sens sa joue mouillée sur mon épaule, ses pieds froids contre mes mollets, sa respiration qui se détend. Un dernier soupir, profond et salvateur, et enfin le sommeil qui le gagne pour l'évader. C'est la première nuit la pire.

5 commentaires:

Gomeux a dit…

T'es vraiment une amie de luxe.

Doparano a dit…

ouais, comme il dit...

Pis j'ai pas eu la chance de me faire faire la cuillère mais souvent t,as été là pour moi et c'est un vrai luxe de t'avoir.

McDoodle a dit…

Je m'imagine plein de choses depuis... Léon a-il le caractère jaloux ?

Miléna a dit…

Doodle: Léon est parti depuis dimanche. Lui aussi s'est sauvé sans crier gare, avide de parcourir les espaces verdoyants du Cap. Il est en sécurité parmi les nouvelles fleurs mauves de la clairière. Il n'a jamais été jaloux. Et en plus, je te rappelle qu'il est gay et que c'est Jonas qui a le coeur brisé, maintenant...

McDoodle a dit…

Aaaargh moi pis ma mémoire de baba imbibé de rhum!

Pauv' pingouine!