vendredi 15 août 2008

Boris

Boris déboulait lentement d'une plante carmine. Il louvoyait entre les pompons de sa garçonnière, les antennes en rade et la carapace de guingois. Je m'étais éloignée du groupe pour faire quelques clichés, grand bien m'en fit. Je ne tenais pas particulièrement à ce que mes collègues de travail sache que je parle désormais très bien l'escargotois, ils auraient trouvé ça bizarre. J'ai jeté un coup d'oeil furtif derrière mon épaule avant de m'accroupir devant lui pour me présenter. Il m'a d'abord regardé d'un oeil torve, curieux d'entendre mes murmures parvenir si clairement à son cervelet embrumé. Il n'avait pas l'air en état, le pauvre. Je lui ai bien sûr parlé d'Ambroise avec force détails mais son nom ne lui disait rien du tout. Boris était né là, aux Jardins du Grand Portage, et jamais il n'en avait franchi les limites. Il était trop bien près de la mare émeraude, à l'ombre des tournesols géants. Il avait ses habitudes, ses repères et, il faut le dire, très peu d'ambitions.

Je l'ai néanmoins invité à se joindre à nous. C'était jour de fête, après tout, et comme je voyais qu'il était déjà dans l'ambiance, je ne voulais pas le laisser seul à l'ombre. J'entendais les bouchons sauter et les verres tinter, c'était l'heure de l'apéro. J'avais envie de le garder sous la main pour divertir la compagnie. Je l'ai mis dans ma poche et je suis allée rejoindre mon équipe attablée devant un menu champêtre. J'ai déposé Boris près de moi et nous avons trinqué à tout: nul besoin de raisons faramineuses pour festoyer. Juché sur nos bouchons, il a immédiatement pris le plancher pendant que je m'efforçais de traduire ses histoires avec bonhomie. Ma patronne me regardait d'un air circonspect. Mes collègues aussi. Je leur ai expliqué la nature de ma relation avec les escargots et ils ont compris; ils n'en sont plus à une surprise près, avec moi.




Un peu avant l'heure du départ, je suis allée faire une dernière tournée des jardins avec lui. Il dodelinait de la tête, éreinté d'avoir tant parlé. Les voix des autres ricochaient au détour des sentiers. La terre était enfin sèche. Le soleil baissait.









Boris s'est endormi sur mon épaule. Je ne l'ai pas réveillé pour lui dire au revoir. Je l'ai seulement déposé sous une feuille de chardon.

4 commentaires:

Mek a dit…

Schlthlsh !

Anonyme a dit…

Tu as bien fait!

J'ai refait une tentative, pour le courriel... ça marché ? Sinon, j'utiliserai les grands moyens :)

Doodle

Jo Jaguar a dit…

Boris est bien beau, tout transparent à coquillette jaune. a croquer. Qu'est-ce qu'il doit emballer point d'exclamation. Le cochon!

gaétan a dit…

Bonjour,
haha j'ai été moins gentil que toi avec Hector (Échos de jardin (14))le cousin pas de classe de Boris et d'Ambroise :-)